Rentrée : 2159 enfants dorment dans la rue, 31 en sont morts.

C’est l’information qui devrait faire les grands titres, empêcher les politiques de dormir : 2159 enfants dorment à la rue en France, dont 503 gamins de moins de trois ans, selon un rapport de l’Unicef publié ce 28 août. Un chiffre en pleine explosion : +30 % depuis 2022. Pire, 31 enfants sont morts cette année dans les rues de la sixième puissance mondiale. Ça nous a rappelé les visages de Sofia et de ses trois enfants, Inès, Naël et Amir…
Rentrée

Par Pierre Joigneaux

« Allo ? Allo ? Mes enfants sont à la rue… Inès, 7 ans, Naël, 10 ans, Amir, 13 ans. On est devant la gare, elle vient de fermer, il est minuit…
– Madame pour cette nuit, désolé, pas de solution pour vous…
– C’est pas pour moi, c’est pour mes enfants ! Demain ils ont école tous les trois. Il fait deux degrés…
– …
– Même pas des couvertures ? »

C’est ma rentrée, ce jeudi matin. Je me sers un grand café pour me réveiller, mais le retour à l’actualité va être plus efficace que le café. Je vois passer le rapport de l’Unicef, je me frotte les yeux pour relire le titre : « 2159 enfants ont passé la nuit à la rue avant la rentrée scolaire. » Je repense à Sofia, à la rue avec ses trois enfants hauts comme trois pommes, Inès, Naël et Amir, que j’avais rencontrés l’hiver dernier.

Je me demande aussi : comment c’est possible ? Dans un pays aussi riche ? Dans un pays où 500 personnes ont engrangé 557 milliards d’euros supplémentaires en seulement sept ans ? Mettre à l’abri ces 2000 gamins, ça coûterait si cher que ça ? C’était une promesse, une de plus, du gouvernement, en 2022 : atteindre l’objectif de « zéro enfant à la rue ». On se rappelle aussi de la déclaration d’Emmanuel Macron, un soir de juillet 2017 : « Je ne veux plus, d’ici la fin de l’année, avoir des femmes et des hommes dans les rues. » Huit ans plus tard, ils sont plus de 300 000 à y dormir, dans notre pays…

Y mettre fin ? « Les politiques ne veulent pas. »

« La situation sur le front de l’accès à l’hébergement est chaque jour plus dramatique, les pouvoirs publics doivent réagir mais malgré le dépôt de nos recours, rien ne change », déplore Manuel Domergue, directeur des études de la Fondation pour le Logement. « Au contraire, les dernières remontées de terrain et les annonces budgétaires pour 2026 nous font craindre le pire. » Adeline Hazan, présidente de l’Unicef France, à l’origine de ce rapport choc, ne dit pas autre chose : « Chaque année, nous constatons avec indignation qu’un nombre croissant d’enfants dorment dans la rue, exposés à des conditions de vie indignes et à des dangers quotidiens. » l’Unicef le répète, le martèle : « Malgré les promesses répétées des gouvernements successifs, la situation s’aggrave année après année. Ces chiffres marquent en effet une augmentation du nombre d’enfants sans solution de 6% par rapport à 2024 et de 30% depuis 2022. Face à la saturation chronique des dispositifs d’hébergement d’urgence, même les personnes les plus vulnérables – femmes enceintes ou accompagnées d’enfants en bas âge – se retrouvent de plus en plus fréquemment sans solution. » Adeline Hazan : « Pourtant, nos organisations formulent des recommandations claires et proposent des solutions concrètes, efficaces et réalistes. Ce qui fait cruellement défaut aujourd’hui, ce ne sont ni les ressources, ni l’expertise mais bien une volonté politique ferme de mettre fin à l’inacceptable. »

Une volonté politique ? En augmentant, par exemple, le nombre de places d’hébergement d’urgence, notamment des places adaptées aux besoins des enfants et des familles, ou de lancer enfin un plan ambitieux de production de logements sociaux et très sociaux ? Mais la couleur du budget annoncé par François Bayrou au milieu de l’été va dans le sens inverse : des coupes de crédits toujours plus grandes sur les plus fragiles, pour continuer envers et contre tout ses cadeaux aux plus riches, peu importe s’ils grèvent les recettes et font exploser la dette.

La République abandonne ses enfants à la rue ? Peu importe, tant que les dividendes continuent à pleuvoir.

Et tant pis si, comme on le soulignait dans ces colonnes, en 2024, 855 personnes sont mortes à la rue. Parmi elles, 31 enfants. Mais certains s’étonnent ou s’indignent, même, encore, des appels à manifester le 10 septembre…

Pour aller plus loin : notre reportage Sofia, ses gamins et les 350 000 autres invisibles à la rue.fakirpresse.info/sofia-ses-gam…

fakirpresse.info/rentree-2159-…

Rentrée : 2159 enfants dorment dans la rue, 31 en sont morts. - fakirpresse.info

C’est l’information qui devrait faire les grands titres en cette rentrée, empêcher les politiques de dormir : 2159 enfants dorment à la rue en France, dont 503 gamins de moins de trois ans, selon un rapport de l’Unicef publié ce 28 août.

^{Pierre Joigneaux (Fakir)}